(Photos et vidéos par Richter, chronique par Renaud) Quoi de mieux qu’un petit concert pour se mettre en jambe avant un gros festival ? Comme les choses sont bien faites, il se trouvait que le week-end précédent le M’Era Luna, Purplemoon nous offrait sur un même plateau The Crüxshadows (darkwave, US), Heyaeb (electro, B) déjà remarqué lors du festival Purplemoon "The Invitation" 2002, et Diskonnekted (electro, B) autre jeûne formation electro au visuel (maigrelet) dépouillé, dont le chanteur aux cheveux de feu ne nous était guère inconnu. On ne change pas une formule qui gagne, et c’est gaillardement que nous partîmes du sud-est de Paris pour un petit périple qui commence à ce jour à avoir des allures de promenade de santé. A peine le temps de se chauffer les oreilles avec quelques extraits (trompeurs) glanés sur les sites respectifs des groupes, que déjà nous étions stationnés à deux pas (et ce n’est pas une image... *soupir*) de l’entrée de la petite cour du Zaal Eland qui avait déjà accueilli Mortiis quelques mois plus tôt à peine. En avance d’une petite heure, nous pûmes même nous offrir le luxe d’une copieuse collation dans une brasserie du cru, qui résonna de l’intro de Temple Of Love lorsque nous pénétrâmes dans la salle... Sympathique clin d’œil à des clients dont les artifices vestimentaires ne laissaient guère de doute sur leurs affinités musicales. Deux crans de ceinture plus loin, il était temps d’aller écouter un peu de musique, tout de même... LE CONCERT DE DISKONNEKTED Nous le craignions, ils l’avaient fait... Nous nous trouvions face à une formation electro, certes méritante mais hélas par trop classique : Un chanteur peu mobile et un instrumentiste-machiniste rivé à ses claviers qui déversaient leurs pistes MIDI avec une certaine froideur. Une petite surprise toutefois : le chanteur était en fait le sémillant maître de cérémonie du précédent festival Purplemoon (mais siii, le beau blond sorti tout droit de son skatepark californien) chaussé pour l’occasion de lunettes noires d’un goût... Mmmh... Diskonnekted c’est quoi ? De l’electro dancefloor aux fragrances d’Assemblage 23, Icon of Coil et consorts, efficace sans parfois vraiment l’être, comme s’il manquait à la plupart des morceaux ce petit détail qui rend une mélodie imparable, comme un « Divide » dont on attendrait en vain le refrain. La présence sur scène un brin « détendue » du jeune homme n’aidait pas non plus à enflammer un public composé pourtant de nombreux amis très expressifs. Quelques titres : Out of This World, Kill Your Honey, Bulletproof, Already Lost... Pour résumer, des sonorités acides, des nappes planantes, des boucles cinglantes, des rythmique ventrues estampillées Roland époque Juno / Jupiter et TR 909, et un chant pop à la Mesh, certes jouissifs pour l’amateur de trance datée et le junkie electro mais qui pêcheraient presque par excès de rigueur et de netteté, comme trop premier degré. Un set cependant propre à ouvrir la soirée ceci dit alors... « Bien mais peut mieux faire » ? LE CONCERT DE HEYAEB Autant le dire de suite : Nous nous étions grossièrement fourvoyé à propos de Heyaeb... On nous en avait pourtant dit du bien, mais les extraits étaient au bout du compte si peu représentatifs de la claque que nous nous apprêtions à prendre, que nous en étions venus à soupçonner quelque mauvaise plaisanterie de la part du webmestre (« c’est des bootlegs de Jeff Buckley là ? »). Nous nous repentîmes bien vite et songèrent tout aussi vite à la pénitence adéquate, mélange improbable de savon, de chanvre cru et d’orties... Dès les premières mesures du set, emmené par deux claviers (électriques) et un batteur (altier et souriant), nous prenions conscience de la jouissive punition qu’allait nous infliger Heyaeb. Tout y était : puissance du pied et des basses ronflantes, mélodies et gimmick imparables entre rafales d’arpégiateur et nappes enthousiasmantes d’eurodance, chant froid, tantôt plaintif, tantôt tranchant et agressif et spectacles ! Baigné d’ambiances mauves et bleues, nimbé de fumées évanescentes, le groupe tout entier paie de sa personne et sue à grosses gouttes, qui derrière les machines, qui au micro, tantôt debout et sautillant, tantôt au sol, abattu, dans une débauche de poses et d’expressions plus théâtrales les unes que les autres. La musique vaut ce qu’elle vaut, mais le charisme est bien là , et le gothique pas loin derrière... Pas plus que le second degré, lorsque le batteur (hilare et déchaîné) ou un acolyte aux faux airs de Barbie faite femme prennent le micro pour deux titres pour le moins... surprenants... « Another Way to Suffer » ? LE CONCERT DE THE CRUXSHADOWS Enfin, nous allions pouvoir goûter toute l’extravagance de Rogue le diligent, Rogue le véloce, Rogue le péripatéticien au goût aussi prononcé pour la crapahute que sa coiffure défie les lois de l’équilibre capillaire... Le public massé devant la scène ne le vit fendre la foule que bien après le début du récit qui posait le décor de la première partie du concert, le récit du jugement de Pâris, ce berger sollicité par Héra, Athena et Aphrodite pour les départager en désignant la plus belle d’entre elles... Trois déesses, incarnées par trois beautés : deux danseuses et Rachel, la violoniste. Rogue monte sur scène et entonne le premier morceau, ponctuant chaque nouvelle chanson par une page de l’Iliade - l’enlèvement d’Hélène, le siège de Troie, la mort de Patrocle - et de l’Odyssée en évoquant l’errance maritime d’Ulysse aux mille ruses pendant dix ans... Et Rogue danse, descend dans le public, se perche sur une chaise comme scrutant un improbable horizon, tandis que les rythmiques binaires et les claviers interdisent à qui que ce soit de demeurer statique, tant l’efficacité du groupe est décuplée par l’extrême proximité de la scène sur laquelle les musiciens et les danseuses délivrent, plus qu’une interprétation de leur répertoire, une véritable performance. Jusqu’à ce qu’un solo de violon de Rachel fasse retomber un calme plus électrique que quiet, tandis que les oreilles et les corps se tendent à l’affût des premières notes de... Deception qui, lancée par un autre reconnaissable solo de violon aux assonances yiddish, déchaîne une clameur surexcitée qui ira désormais croissant jusqu’au terme de ce concert, émaillé de la traditionnelle gigue endiablée de Deception, tandis que le public reprenait le refrain en chœur, de la déferlante Tears et, en rappel, d’un rageur Marilyn My Bitterness porté sa guitare rugueuse et par les inépuisables ressources de Rogue qui invite d’abord deux demoiselles du public à danser sur scène, puis tous ceux dont il croise le regard, et c’est ainsi que le concert se termine, une vingtaine de chanceux sur la scène autour d’un Rogue rassembleur et charismatique... Définitivement, musique dark peut être festive, il n’y avait qu’à observer les sourires ravis sur les visages de chaque spectateur ou presque... Un concert mémorable, dignement clos par une séance de dédicaces et un brin de dialogue qui prouva que tout artistes fussent-ils, les Crüxshadows avaient aussi le sens du contact avec les fans et le goût de l’échange. Sepul-râle-ment vôtre, Renaud / evil.muffin.666 LES VIDEOS (Clic droit et "Enregistrer la cible sous" conseillé / Right clic and "Save target as" recommended) Ces extraits vidéos sont à titre d'illustration et leur qualité sonore n'est pas représentative du groupe en concert / These small video excerpts are for promotional use only and the low-fi sound is not representative of the band quality in live ! LE CONCERT DE DISKONNEKTED LE CONCERT DE HEYAEB LE CONCERT DE THE CRUXSHADOWS Ci-dessous une video intégrale du concert: "Marilyn, my bitterness" de THE CRUXSHADOWS (30 Mo)... avec l'invasion de la scène par le public. Tschüß ! RICHTER |