(Photos par Richter, chronique par Renaud) Etrange comme certains artistes, par leur démesure, pousseraient, par un effet de mimétisme ou de contagion, le premier venu à faire des choses tout à fait déraisonnables. Bon, il faut tout de même souligner que selon M6, dans sa grande sagesse, Rammstein est la révélation néo-métal de l’année 2004. Ca suscite l’engouement des foules, forcément... Qu’on soit fan ou non, glosant sur « une scène dark qu’était mieux avant, quand il y avait plus de Cassandra Complex et moins de VNV Nation », Rammstein fait couler l’encre et attise le feu des passions diverses. Nouvel album, nouvel exemple, et d’ailleurs, à bien y songer, faire l’aller-retour Paris-Anvers sans billet pour cette première date de la tournée, négocier une place au marché noir par téléphone (en plein trafic sur une autoroute belge), par le biais d’une amie déjà sur place et finalement se délester de 90 Euros sur le trottoir pour la dite place, ça a comme un côté échevelé, aux frontières de la fébrilité hirsute du fan lambda. Allez savoir... LE CONCERT DE EXILIA Partis donc de Paris en milieu d’après-midi, nous avions bien évidemment raté la première partie, Exilia, combo italien de métal cross-over, fort sympathique à défaut d’être convainquant musicalement. Nous aurons pu toutefois tailler la bavette et prendre quelques photos souvenirs en backstage avec eux en guise de compensation. D’autant que nous ne devions plus les revoir : Choisis par défaut, ils auront vite été remplacés par les finlandais d’Apocalyptica. Forcément, l’affiche gagne en crédibilité. Nota : en 2001, lors de la tournée Mutter, c’était également un groupe étiqueté « métal pour jeunes » qui tenait la première partie : Clawfinger. De là à parler de stratégie commerciale (peut-être d’ailleurs faut-il y voir la source de la « révélation », selon la chaîne du Loft et du grand Test de QI réunis), il n’y a qu’un pas de New Rock... Bref, le Sportpaleis d’Anvers est plein ce mardi soir, et le contenu des 16 semi-remorques de technique attend patiemment sur scène qu’on le sollicite. Ce qui laisse le temps de songer aux premières impressions laissées par ce Rammstein nouveau : à l’écoute, Reise, Reise avait de quoi frapper par sa richesse mélodique et le sentiment de maturité qui s’en dégageait. Moins de riffs métal, des lignes de batterie plus fouillées, davantage de nappes grandioses, autant dire que l’exécution live était très, très attendue. LE CONCERT DE RAMMSTEIN Obscurité, tension, enthousiasme, clameur : c’est le titre éponyme Reise, Reise qui ouvre le concert, permettant, en mid-tempo, de détailler la scène : deux niveaux de structures massives, encadrés de part et d’autre par de petites plateformes montées sur un bras hydraulique. Un spectacle impressionnant, renforcé par l’image d’une foule compacte, omniprésente et très, très attentive dans cette salle pourtant gigantesque qui contient aisément Bercy, voire davantage. Ca tombe bien quand on y songe, c’est pour bientôt... Des premiers titres, partagés entre Reise... et Mutter – Reise, Reise (grandiose), Links 2 3 4 (gentiment subversif) et Keine Lust (aussi puissant et homogène que sur l’album) – peu d’images, les photographes n’ayant été introduit dans la salle que pour Morgenstern, en septième position sur la setlist. Regrettable, car si le visuel avait été très sage jusqu’alors, un Feuer Frei lancé dans un véritable déluge de feu rappelle que Rammstein, sur scène, c’est aussi une spectaculaire tuerie avec de vrais morceaux de pyrotechnie dedans... Plus sobres, Dalaï Lama et Morgenstern viennent ensuite, en prémisses à une saynète inédite à base de chaudron, de cuisson à feu vif, de micro en forme de couteau à désosser et - surprise - de lance-flammes pour Mein Teil. Dans le chaudron, le clavier et au micro à désosser, un Till espiègle, coiffé d’un turban, qui gesticule et grimace, lance-flammes au poing, arrosant copieusement le dit chaudron de longs jets enflammés. Un régal pour les yeux... Pendant ce temps-là , les guitaristes montent et descendent sur leurs plates-formes et le bassiste, presque discret, fait son office dans un coin de scène. On les oublierait presque, pour le coup... La suite ? Deux titres dans ce même mid-tempo qui domine le dernier album : Stein um stein et Los, avant un retour au diptyque Herzeleid / Sehnsucht, qui avait posé les bases d’un style Rammstein déjà culte. Du riechst so gut (98), lancé comme de coutume par le tir d’une flèche incandescente au dessus du public, provoque une véritable vague d’euphorie dans ce même public qui fait résonner la salle de ses chœurs, tandis que l’arc de Till, tournoyant, vomit ses gerbes d’étincelles. Du Hast enchaîne, puis la bombe Sehnsucht, avant un retour au présent avec le brûlot Amerika. « This is not a love song » certes, mais c’est sous les vivats et dans un tonnerre d’applaudissements que le groupe quitte la scène... pour revenir une poignée d’instants plus tard avec l’hymne Rammstein, son manteau enflammé et sa pose christique, Sonne, puis Ich Will. Un rappel intense, exalté et exaltant jusqu’à la ballade Ohne dich, qui voit s’élever quelques centaines de briquets allumés. Moskow ne sera pas jouée ce soir, dommage, mais c’est une version longue de Stripped, goûtée la larme à l’œil pour sans doute la plupart des fans de DM présents qui clôt cette première date de la tournée. Prochains rendez-vous sur le sol français : les 9 et 10 février au Zénith de Lille, le 11 au Palais Omnisport de Paris Bercy et le 12 au Galaxie d’Amneville. Renaud Q Vous pouvez retrouver la chronique de ce concert et une sélection des photos dans le numéro de fevrier/mars 2005 du magazine ELEGY (p 38-39). Tschüß ! RICHTER |